Avis d'expert

Jeep Grand Cherokee Overland 4xe 2023 : essai routier

7,6
10
SCORE AutoHebdo
Ce score est attribué par notre équipe d’experts après des tests approfondis de la voiture
  • DESIGN
    7/10
  • Sécurité
    9/10
  • HABITABILITÉ
    8/10
  • CONVIVIALITÉ
    7/10
  • CARACTÉRISTIQUES
    9/10
  • PUISSANCE
    8/10
  • CONFORT
    7/10
  • AGRÉMENT DE CONDUITE
    7/10
  • CONSOMMATION DE CARBURANT
    8/10
  • VALEUR
    6/10

Exit le moteur V8! La surprise a été de taille pour les amateurs du Grand Cherokee quand cette nouvelle est tombée. Dans la foulée de la populaire version PHEV du Wrangler, tous s’attendaient à ce que l’écusson 4xe (pour « Four by « E » », ou « quatre par électricité ») allait s’afficher sur la nouvelle cuvée, mais plus d’un inconditionnel aura été surpris du fait que la motorisation hybride rechargeable vient de facto remplacer les V8 si populaires au sud de la frontière. Les habitués de grosses cylindrées pourront se consoler en achetant la nouvelle version allongée à trois rangées de sièges du Grand Cherokee, laquelle offre toujours le V8 en sus du V6 livré de série. Mais pour la classique version cinq places, mieux adaptée aux sentiers, il faudra se rabattre sur le 4xe pour obtenir les chevaux supplémentaires souvent convoités par les amateurs de « vrais » VUS. Depuis ses débuts, le Grand Cherokee a toujours joué le rôle de baroudeur en costard de soirée, mais il traîne une réputation de grand buveur assumée. C’est donc habillé d’un smoking tout noir sur cuirs fins que le 4xe se présente à nous cette semaine, question de prouver que ses attributs virils survivent à son virage écolo.

Design : 7/10

Les vrais amateurs de Jeep n’ont d’yeux que pour le tout premier Grand Cherokee, entièrement conçu maison par American Motors, alors propriétaire 100% américaine de la célèbre marque de tout-terrain. Les générations suivantes ont subi l’influence et la génétique de parents adoptifs du vieux continent, qu’on parle de Renault, Daimler-Chrysler ou aujourd’hui de Stellantis (anciennement Fiat-Chrysler puis FCA). Reste que les trois générations qui ont suivi l’originale se sont inscrites dans la continuité. Pour marquer l’exorcisme total des gènes allemands, Stellantis nous offre un Grand Cherokee en rupture avec ses ancêtres. L’effet de toit flottant du pilier C, jumelé à d’effilés feux arrière est le geste le plus fort des stylistes pour signaler ce changement de direction, suivi d’une calandre avant en plongée plus que verticale. Parfois les traditions ont du bon et par pur hasard nous avons croisé un exemplaire tout noir et tout propre de la génération précédente, et il nous a semblé vachement plus classy. Le toit flottant est si tendance du jour qu’il est un peu navrant de le retrouver sur un véhicule de ce prix, et dont le nom fait légende en plus. Le rendu est plus banal que distinctif, et le Grand Cherokee nous paraît plus vertical et moins premium que son prédécesseur, surtout avec les assemblages deux tons qui surlignent ce pilier « D ». L’histoire se répète à l’intérieur où le noir piano s’invite partout, avec reflets, éraflures et traces de doigts bien apparentes sur cet exemplaire avec seulement 8 000 km au compteur. Si le dessin de base n’est pas vilain, la surenchère de textures, surfaces et contrôles donne l’impression d’en faire trop, avec un résultat un peu clinquant.

Puissance : 8,5/10

Avant de crier à l’hérésie à la vue d’un « quatre » sous le capot d’un Grand Cherokee, rappelons que le tout premier Jeep était mû par le même nombre de cylindres. Et ce récent moulin corporatif est une petite merveille que j’ai pu découvrir au volant du Cherokee il y a quelques années. Puissant, souple et frugal, ce 2,0-litres turbocompressé développe 270 chevaux et 295 lb-pi par lui-même, mais il fait ici équipe avec deux moteurs électriques, un premier de 44 chevaux / 39 lb-pi affecté au démarrage et un autre de 134 chevaux / 195 lb-pi accouplé au moteur thermique. Au combiné, on parle d’une pointe de 375 chevaux et 470 lb-pi de couple, des statistiques supérieures à celles de l’ancien V8. Le volet hybride rechargeable est alimenté par une batterie lithium-ion de 14,0 kWh qui loge sous la banquette, tandis que la recharge embarquée offre 7,2 kW de capacité. Surtout, pas de CVT dans un Jeep PHEV alors qu’on retrouve une boîte automatique à huit rapports et un véritable boîtier de transfert avec gamme basse. Oui, la sonorité d’un « p’tit quatre » surprend dans un Grand Cherokee, mais il vous déballe les équidés avec une belle assurance et une linéarité tout électrique, un travail d’équipe qui vous abat le 0–100 km/h dans les mi-cinq secondes. Le moteur électrique est suffisamment puissant pour les déplacements de tous les jours et supporte sans problème autant l’autoroute que les excursions hors route. Et avis aux campeurs : le 4xe possède une capacité de remorquage de 6 000 lb.

Agrément de conduite : 7,5/10

Conçu pour l’aventure hors des sentiers battus, le Grand Cherokee dispose d’éléments suspenseurs robustes dont on ressent la masse non suspendue à travers le (très grand) volant. Cette lourdeur s’estompe avec les kilomètres et une fois lancé, on trouve à ce grand et lourd VUS – plus de 5 600 livres – une aisance étonnante dans les courbes et bretelles d’autoroute. Notre Overland d’essai disposait de la suspension à air semi-active « Quadra-Lift » qui abaisse le véhicule à vitesse de croisière et ajoute à la conception saine des suspensions indépendantes multibras. Comme pour tout véhicule tout-terrain, la direction est imprécise – un must pour que chaque rocher ne vous secoue le poignet sur un sentier – mais ce Jeep se pilote à bonne vélocité avec un certain plaisir. L’on remarque toutefois une progressivité comme une réaction variable de la pédale de frein selon le mode de conduite (hybride ou électrique), et un rappel du poids élevé quand on veut gommer des km/h. Une brève excursion hors route nous a permis de profiter de la garde au sol la plus élevée offerte par le « Quadra-Lift », donnant à notre Jeep l’aspect d’un véhicule modifié – voyez les photos!

Convivialité : 7/10

Laissée en mode automatique, la suspension à air s’abaisse en position de stationnement, ce qui facilite l’entrée et la sortie du véhicule sans pour autant amputer la garde au sol pour les sentiers. Plus d’un passager s’est senti plus haut une fois en mouvement, et effectivement le véhicule se relève de lui-même. Les grandes portières facilitent l’accès à bord, et pour une rare fois, on constate que le passager avant a non seulement droit aux fonctions de massage, mais aussi à la mise en mémoire de ses réglages. La climatisation à quatre zones limite les disputes, tout comme les quatre places chauffantes et les trois (!) écrans dédiés aux passagers – seule la place centrale arrière en est dépourvue. Mais comme pour tout véhicule dit de luxe, le nombre d’accessoires et de gadgets génère une pléthore de boutons, commandes et menus, tous d’actions différentes. Touches à bascules, molettes rotatives, commandes cachées derrière le volant, menus imbriqués, pavés tactiles de choix de motorisation cachés à votre genou gauche, commandes logées à plat au-dessus de l’infodivertissement… On s’y perd et certaines qui devraient être simples, comme la mise en mémoire des réglages du siège, ne sont pas intuitives. Si l’on apprécie les touches physiques en lieu du tout-à-l’écran, il résulte des doublons, une complexité et une surabondance cognitive comme organisationnelle. Un peu d’épuration ferait grand bien…

Sécurité : 9/10

Le Jeep Grand Cherokee 2023 obtient cinq étoiles aux essais de collision de la NHTSA et une palme « Top Safety Pick + » de l’institut des assureurs américains, l’IIHS, ce qui augure bien si le pire devait arriver. Pour l’éviter, le Grand Cherokee compte sur une suite d’aides à la conduite jugée « supérieure » par l’IIHS. Cette suite comprend une gestion active du maintien dans la voie, un régulateur de vitesse adaptatif avec capacité d’arrêt-départ, la surveillance des angles morts et de la circulation transversale arrière, l’avertisseur de collision imminente avec freinage assisté pour urgences, cyclistes et piétons et les radars de stationnement avec freinage automatique en marche arrière. En option, certains modèles du Grand Cherokee possèdent aussi une caméra de vision nocturne avec détection des piétons et animaux.

Caractéristiques : 9/10

La version PHEV du Jeep Grand Cherokee se décline en versions 4xe (infodivertissement de 10,1 po avec navigation et chaîne audio Alpine à neuf haut-parleurs de 506 W, écran pour passager avant, jantes en alliage de 18 po, attelage de remorque classe IV, feux et phares à DEL, toit panoramique, sellerie cuir/suède, volant chauffant et hayon électrique), Trailhawk (suppression du toit panoramique, plaques de protection, différentiel arrière autobloquant électronique, barre stabilisatrice avant à déconnexion, suspension pneumatique « Quadra-Lift »), Overland (cuir Nappa avec ventilation à l’avant, toit panoramique à deux panneaux, chaîne audio McIntosh 950 W à 19 haut-parleurs, hayon mains libres, jantes de 20 po), Summit (sièges avant à 16 réglages électriques avec massage, volant cuir/bois, détection somnolence et assistance active à la conduite) et enfin Summit Reserve (jantes 21 po, cuir Nappa aux portières, cuir Palermo aux sièges, banquette arrière ventilée). Vous aurez compris que même la version éponyme « de base » 4xe est fort bien équipée et que hormis le Trailhawk, les livrées supérieures ajoutent simplement au luxe. La chaîne audio McIntosh de notre Overland d’essai a ravi nos oreilles, certes, mais sans les épater à la hauteur de ses spécifications, surtout qu’elle a refusé de lire le lecteur USB qui nous accompagne dans tous nos essais.

Habitabilité : 8/10

Dépourvu de la populaire, mais souvent inutile banquette de troisième rangée, le Grand Cherokee présente un volume habitable supérieur à celui du Volvo XC90 et du Mazda CX-90. Les ingénieurs ont placé la batterie sous la banquette arrière, ce qui a pour effet de ne relever ni le plancher ni le coffre. Il faudrait passer immédiatement d’un modèle essence pour réaliser que l’espace pour la tête à l’arrière est un peu plus menu. Quatre adultes de 1,80 m seront parfaitement à l’aise ici, mais le cinquième aura à composer avec la console centrale, comme chez tout concurrent. Sans l’encombrement d’une banquette, le coffre à ouverture assistée est bien plat et profond, et on retrouve sous le plancher une roue de secours pleine grandeur, une précaution appropriée avec un tout-terrain. Le volume cargo ultime dépasse non seulement celui du BMW X5, mais aussi celui de quelques « trois rangs » – du bon boulot!

Confort : 7,5/10

Avec la suspension pneumatique du modèle d’essai, on s’attendait à rouler sur un coussin d’air, littéralement. En fait, comme le veut la tendance lourde du marché, ce Jeep est plutôt suspendu « à l’allemande », avec une assiette beaucoup plus ferme qu’anticipé et plus d’un passager a prononcé le mot « camion » sur mauvaise chaussée. On retrouve donc cette maîtrise des mouvements à haute vitesse propre aux produits de luxe, mais sur le pavage lunaire des villes, ça brasse plus qu’anticipé, surtout que les lourds PHEV sont généralement plus « confos » en ces circonstances – si vous pouvez vous passer des cuirs Nappa et des aptitudes hors routes, un Kia Sportage PHEV sera plus souple. C’est que le « Grand » est bâti pour les sentiers et cette robustesse musclée transpire nettement. En mode électrique, le silence est total et malgré les pneus d’hiver montés sur notre véhicule d’essai, les bruits de roulement sont bien contenus. En mode essence, le 4-cylindres se contente de 1 750 tours/minute à 100 km/h et ne grimpe qu’à 2 000 tours à 119 km/h. Ce n’est qu’en ville qu’il se fera entendre, mais rien de très dérangeant. Quant aux sièges, les massages sont efficaces, mais on s’éparpille dans les multiples réglages et on n’a jamais tout à fait trouvé satisfaction – la simplicité a parfois du bon!

Économie de carburant : 8,5/10

Jeep a placé le port de recharge au meilleur endroit qui soit, sur l’aile avant gauche. Le portillon, bien que non verrouillé, était parfois difficile à bien enclencher une fois la recharge terminée. Et comme pour tout PHEV, ces recharges seront fréquentes afin d’optimiser la mobilité électrique! Promettant une autonomie de 42 km, en cette froide semaine d’automne, l’ordinateur de bord nous prédisait des autonomies allant de 32 à 41 km selon la journée. Sur des rues locales, nous avons réussi à parcourir 36 km sans essence, sans compromis sur le chauffage. Parions que les 42 km peuvent être atteints avec des conditions idéales. Malgré le froid et les pneus d’hiver de notre Jeep d’essai, l’ordinateur de bord nous crédite les trois quarts de notre kilométrage sous électricité, avec un maigre quart à l’essence, surtout dû à la journée de prise en main où le Grand Cherokee nous a été livré avec une batterie à 1% de charge. En mode essence, nous avons facilement battu la cote ville RNCan avec un 8,0 L/100 km digne d’une compacte. En factorisant les kilomètres parcourus en mode électrique, notre moyenne hebdomadaire a été de 2,3 L/100 km.

Valeur : 6/10

Avant la pandémie, les produits du groupe Stellantis étaient souvent affublés de prix « Sears », c’est-à-dire des PDSF gonflés toujours réduits au net par diverses promotions. Dans le monde d’aujourd’hui, les tarifs ont augmenté et les rabais se font rares, ce qui fait que le quasi-luxe Jeep Grand Cherokee affiche maintenant des tarifs luxe bien assumés, plaçant la variante 4xe au-delà des seuils des incitatifs gouvernementaux – un pensez-y bien alors que près de 10 000 $ séparent les versions V6 et 4xe de notre livrée Overland d’essai. À plus de 100 000 $ avec les taxes, notre véhicule d’essai est cher payé, les cuirs Nappa un peu perdus dans cette mer de noir piano prolétaire dont l’assemblage n’est pas digne du prix demandé. La version 4xe nous semble la plus recommandable à 76 000 $ frais inclus, mais la structure de prix est complexe, plusieurs options étant facturées à part même si elles sont finalement obligatoires, une astuce qui abaisse en apparence le tarif d’entrée.

Conclusion

Qu’on se le dise, l’électrification du Jeep Grand Cherokee n’enlève rien à ses capacités et le rend même plus agréable au quotidien, la mécanique PHEV étant souple, puissante et efficace, pour autant qu’on pense de manuellement mettre le véhicule en mode électrique à chaque démarrage. Agréable à conduire et bien équipé, le « Grand » souffre néanmoins d’une surchauffe de ses tarifs, assaisonnés de surcroît d’options obligatoires et d’un chevauchement de contenu entre les livrées plus cossues. Jeep a longtemps logé dans ce purgatoire entre les gammes « populaire » et « luxe », mais en passant aux tarifs de la seconde avec la qualité de la première, on se retrouve avec une addition au-delà des aspirations de ce Jeep qui, autrement, s’avère fort intéressant. Une problématique qui affecte aussi les cousins chez Dodge et Chrysler…

Les concurrents
Caractéristiques
Cylindrée 2,0 L
Nb. de cylindres L4
Puissance 375 ch @ 5 250 tr/min
Couple 470 lb-pi @ 3 000 tr/min
Consommation de carburant 10,3 / 9,7 / 10,0 L/100 km ville/route/comb
Volume de chargement 1 068 L / 2 005 L sièges rabattus
Modèle à l'essai Jeep Grand Cherokee Overland 4xe 2023
Prix de base 81 495 $
Taxe climatiseur 100 $
Frais transport et préparation 2 095 $
Prix tel qu’essayé 93 965 $
Équipement en option
10 275 $ – Peinture Cristal noir nacré, 495 $; Ensemble Tech de luxe IV (cuir Nappa, sièges avant avec massage et 12 réglages électriques à mémoires, rétroviseur auto atténuant, climatisation quatre zones, recharge sans fil), 2 195 $; Ensemble Protech Évolué III (volant gainé de cuir, instrumentation numérique, affichage tête-haute, lave-glace pour caméra de recul, aides actifs à la conduite, caméras périphériques, vision nocturne avec détection piétons et animaux), 3 295 $; Ensemble de divertissement pour passagers arrière, 2 695 $; Écran interactif pour passager avant, 1 595 $