Avis d'expert

Essai routier : Infiniti QX50 Autograph 2019

7,6
10
SCORE AutoHebdo
Ce score est attribué par notre équipe d’experts après des tests approfondis de la voiture
  • DESIGN
    8/10
  • Sécurité
    8/10
  • HABITABILITÉ
    8/10
  • CONVIVIALITÉ
    7/10
  • CARACTÉRISTIQUES
    9/10
  • PUISSANCE
    7/10
  • CONFORT
    7/10
  • AGRÉMENT DE CONDUITE
    7/10
  • CONSOMMATION DE CARBURANT
    7/10
  • VALEUR
    8/10

De nos jours, les innovations mécaniques sont généralement associées à l’électrification ou encore à la conduite partiellement autonome. Mais face au resserrement des normes antipollution et des cotes de consommation, nombreux sont les manufacturiers qui s’attaquent à la réingénierie de leurs groupes propulseurs. Les boîtes de vitesses sont de plus en plus complexes et innovantes, les moteurs diminuent en cylindrée et se dotent fréquemment de la turbocompression pour préserver leur rendement. Honda a épaté la galerie dans les années ’90 en lançant le calage variable des soupapes, puis le contrôle avancé des moteurs a rendu fiable la mise en pause de cylindres à travers l’industrie. En Formule 1, on a même largué les arbres à cames avec l’actuation pneumatique des soupapes.

Le QX50, dans sa livrée ultime Autograph, présente un luxe, une harmonie des matières, des tons et des agencements à faire pâtir ses rivaux …

Tout ça est très bien, mais les ingénieurs de Nissan/Infiniti nous livrent cette année le Saint-Graal du génie mécanique : la compression variable. Après 20 ans de recherches et le dépôt de 300 brevets, c’est une véritable révolution qui nous arrive en exclusivité sous le voluptueux capot en aluminium du Infiniti QX50 2019.

Anatomie inusitée

Avant d’aborder l’écrin, parlons un peu de cette perle de moteur. Le taux de compression est une donnée clé dans la conception d’un moteur. Sans verser dans la dissertation postdoctorale, ce taux est dicté par le volume de la chambre de combustion, entre le piston et la tête du moteur. Plus le taux de compression est haut, plus efficace sera la combustion et l’efficacité énergétique, au détriment de la durabilité. Par contre, quand le taux de compression est bas, le moteur est plus durable, plus puissant et fort en couple, mais utilise plus de carburant. Dans un monde idéal, faire varier le taux de compression permettrait au moteur de faire face à chaque situation. Et c’est ce miracle que les ingénieurs de Nissan, la maison-mère d’Infiniti, ont réussi.

Ainsi le taux de compression varie en faisant changer la cylindrée, ou si vous préférez la « grosseur » du moteur. Ce deux litres, baptisé « VC-Turbo » par Infiniti, peut en effet passer de 1 970 cc à 1 997 cc, le taux de compression étant de 14,1 : 1 à 8,1 : 1 respectivement, au gré des besoins. Comment? Le diamètre du cylindre étant évidemment fixe, c’est la course du piston dans le cylindre qui est variable. Celui-ci est raccordé au vilebrequin par la bielle via une pièce parallélogrammatique, laquelle se rattache par une seconde bielle à un arbre inférieur de contrôle. Un point de pivot excentrique sur ce dernier, actionné par un servomécanisme, induit en 1,5 seconde le changement de cylindrée via la course verticale du piston. Puisque ce moteur avant-gardiste est destiné à la production de masse (il va remplacer le V6 dans la nouvelle Altima aux États-Unis seulement), Nissan a fait dans le costaud, la compression variable ajoutant 22 lb au poids du moteur. Le résultat? Un 2,0-litres turbo qui livre 268 chevaux et 280 lb-pi de couple tout en offrant des cotes de consommation 30 % supérieures à celles de l’ancien QX50 à moteur V6. Elles restent néanmoins assez près de celle des 2,0-litres turbo classiques de la compétition.

Au-delà du moteur

Allez hop, on ferme le capot pour la suite du texte, promis. Le tout nouveau QX50 2019 vient remplacer le véhicule du même nom, autrefois nommé EX37 et né EX35, et qui était basé sur le châssis de la G35, soit sur une architecture à propulsion avec moteur V6 monté longitudinalement et traction intégrale sur demande. Ce multisegment était plus sportif que pratique et, disons-le, il faisait un peu vieux jeu après 11 ans sur le marché. Le nouveau QX50 fait table rase de son passé et adopte une toute nouvelle plateforme « traction » avec moteur transversal, et dont la rigidité est en hausse de 23 %. On retrouve donc pour 2019 un véhicule au profil plus classique pour cette catégorie, un peu plus haut et à l’habitacle beaucoup plus logeable, mais à l’aérodynamique tout de même 6 % plus fluide que l’ancien modèle. Sa longueur le place dans les VUS compacts de luxe, mais sa largeur est supérieure à ses compétiteurs, faisant de lui un véritable « cinq places » .

Tous les QX50 canadiens sont livrés avec la traction intégrale, une boîte automatique à variation continue (CVT) programmée pour imiter des changements de rapports, avec palonniers derrière le volant et correspondance du régime en rétrogradation s’il-vous plait, et du fameux moteur 2,0-litres VC-Turbo à cylindrée variable. Pas moins de cinq niveaux de finition sont offerts, baptisés LUXE, Essentiel, ProACTIVE, Sensoriel et Autograph, chaque nom donnant un indice des caractéristiques gagnées. À partir du ProACTIVE, la suite de conduite autonome de Niveau 2 ProPILOT monte à bord, laquelle inclut le meilleur régulateur de vitesse à assistance radar qu’il m’a été donné d’essayer, ainsi qu’un contrôle assisté de la direction qu’on peut activer au besoin. Le freinage automatique d’urgence est présent en marche avant comme arrière, et s’avère moins brave que le conducteur pendant les manœuvres de stationnement (lire : il freine avant vous). Lesdites manœuvres sont facilitées par des caméras 360 degrés.

De cuirs fins est serti cet écrin

Infiniti nous a habitués à des habitacles dont la superbe n’a que faire de la rigueur froide de ses compétiteurs allemands. Et le QX50, dans sa livrée ultime Autograph, présente un luxe, une harmonie des matières, des tons et des agencements à faire pâtir ses rivaux, surtout à ce prix. Le design intérieur du Autograph vient marier des cuirs matelassés semi-aniline écrus, des cuirs brun chocolat au lait, de l’Ultrasuède assorti, d’autres empiètements d’Ultrasuède bleu profond, des bois grisés véritables issus de plantations japonaises et quelques chromes discrets. Et ça fonctionne mieux que sur un blouson de chez Desigual, l’élégance de cet intérieur démontrant le talent, voir le don de ses designers. Chapeau. D’ailleurs, il fait partie des dix meilleurs intérieurs de l’année selon Wards.

Et la beauté de cet intérieur n’est pas que superficielle. Les baquets avant, aux cuirs perforés chauffés et ventilés, disposent de huit réglages électriques. Avec la colonne de direction télescopique et inclinable électriquement, la position de conduite idéale se trouve aisément et deux conducteurs peuvent mettre en mémoire leurs réglages. Les instruments analogiques font presque « rétro » de nos jours, mais leur lisibilité est sans reproche. Vous préférez des affichages numériques? Le QX50 dispose d’un affichage « tête haute » projeté au pare-brise et dont le contenu est paramétrable. Entre le compte-tours et l’indicateur de vitesse se trouve l’écran de l’ordinateur de bord, lequel affiche par exemple la consommation moyenne ou les paramètres du pilotage assisté.

Au centre de la planche de bord, on retrouve le système InTouch, composé de deux écrans tactiles VGA, celui du haut, dédié à la navigation, faisant 8 pouces de diagonale et celui du bas, dédié au système audio, aux commandes climatiques et aux paramètres du véhicule, faisant 7 pouces. Quant à l’excellente chaîne audio Bose à 16 (!) haut-parleurs, elle nous fait un cadeau aussi inusité qu’apprécié en 2019 : un bon vieux lecteur CD. Avis aux mélomanes peu férus des MP3.

Une conduite multimodale

De nos jours, il est facile de se confondre dans les multiples modes offerts via les manettes, boutons et menus des voitures de luxe. En conduite de tous les jours, leurs effets sont souvent subtils et on finit par les ignorer au profit d’un favori dont on ne déroge plus. Ici, ce n’est pas le cas.

Le QX50 offre, évidemment, un mode « Normal » , supplanté des habituels « Eco » et « Sport » . Et chacun de ces modes transforme le QX50, tel un acteur jouant des rôles hétérogènes. En mode Normal sur parcours urbain, l’accélérateur est progressif, la direction juste ce qu’il faut assistée, mais la boîte CVT jure autant dans ce décor magnifique que des verres en plastique lors d’une dégustation de champagne. Elle a beau simuler des rapports (en « glissant » à chaque passage de « rapport » ), ça reste une CVT et, dans ce créneau, on se demande pourquoi bien Infiniti n’a pas adopté par exemple l’excellente boîte automatique 8 rapports de l’équipementier ZF qu’on retrouve partout dans l’industrie. En mode Eco, l’accélérateur force littéralement sous notre pied, comme pour refuser nos avances. Au point que dans la circulation « crinquée » de la métropole, ça devient un quasi-handicap. Mais quand le milieu autorise la conduite en douceur, ce mode sied bien au véhicule et la CVT se fait plus discrète.

Puis, il y a le mode Sport. Une révélation. La CVT prend vie, se transforme en partenaire idéal au moteur VC-Turbo et emploie enfin des lignes de code dignes du créneau. Le régime moteur grimpe à peine à vitesse constante versus « Normal » , mais la vélocité s’accroit à un rythme qui peut surprendre sur autoroute (le QX50 peut atteindre 230 km/h selon Infiniti). La direction est plus affûtée, les réponses plus instantanées. Mais n’allez pas croire que le QX50 devient délinquant, loin de là. Il demeure « classe » , mais voilà, le mode Sport est un espresso double dont il avait besoin.

Outre les modes, l’adhérence des gros pneus de 20 pouces est remarquable, pour autant que la chaussée est lisse. Fissures et autres trous font ressortir les limites des tarages des suspensions. Autrement, ces dernières assurent une assiette stable en virage serré sans jamais donner l’impression de limer les poignées de portières sur le bitume. Pas de tangage, pas de roulis, et si le QX50 a un penchant, c’est pour le club des sportifs de la catégorie. Les métamorphoses internes du moteur passent inaperçues, mais toute cette quincaillerie a comme bénéfice secondaire de parfaire la course des pistons, éliminant le besoin d’arbres de balancement. À haut régime, la sonorité du VC-Turbo gagne en mordant, rien pour déplaire.

Un Cinq étoiles?

En faisant table rase de son passé, le QX50 rentre dans le rang dans une catégorie bien peuplée, celle des multisegments intermédiaires de luxe. Pour s’y distinguer, il a pour atout sa gueule d’enfer, un moteur à faire « tripper » un ingénieur et un habitacle à rendre jaloux un styliste de chez Land Rover. Le tout à prix d’aubaine quand on regarde chez la compétition. Cinq étoiles? Pas tout à fait. Infiniti devrait se démarquer de Nissan en lui laissant la boîte CVT Xtronic, qui manque ici de standing, au profit d’une automatique classique comme celles qui équipent moult compétiteurs. Sur les quelque 725 km d’essai, le VC-Turbo a livré une moyenne calculée de 11,3 l/100km (contre 10,6 affichés), mieux qu’un V6, mais similaire à la compétition. Noyé dans cette cote se trouve cependant un parcours routier dans les 70–90 km/h où l’ordinateur de bord nous a crédités d’un beau 7,8. Comme quoi ce moteur révolutionnaire peut livrer la marchandise selon les variations du moment.

Les concurrents
Caractéristiques
Cylindrée 2,0L
Nb. de cylindres L4
Puissance 268 ch @ 5 600 tr/min
Couple 280 lb-pi @ 1 600–4 800 tr/min
Consommation de carburant 10,0/7,8/9,0 L/100 km ville/route/comb10,0/7,8/9,0 L/100 km ville/route/comb
Volume de chargement 881 / 1 823 L sièges abaissés
Modèle à l'essai Infiniti QX50 Autograph 2019
Prix de base 57 990 $
Taxe climatiseur 100 $
Frais transport et préparation 2 045 $
Prix tel qu’essayé 60 785 $
Équipement en option
650 $ – Peinture Graphite veloutée métallisée 650 $