Avis d'expert

Essai routier : Cadillac XT5 AWD Platinum 2018

7,2
10
SCORE AutoHebdo
Ce score est attribué par notre équipe d’experts après des tests approfondis de la voiture
  • DESIGN
    8/10
  • Sécurité
    7/10
  • HABITABILITÉ
    8/10
  • CONVIVIALITÉ
    7/10
  • CARACTÉRISTIQUES
    9/10
  • PUISSANCE
    6/10
  • CONFORT
    7/10
  • AGRÉMENT DE CONDUITE
    7/10
  • CONSOMMATION DE CARBURANT
    6/10
  • VALEUR
    7/10

Les choses étaient plus simples au 20e siècle. Votre marchand de vin avait sur ses étalages des produits faciles à identifier et d’une variété bien précise : bordeaux, cabernets, chardonnays, merlots et pinots. Les fins connaisseurs tout comme les amateurs savaient exactement à quoi ils avaient affaire quand ils attrapaient une bouteille sur la tablette : cépage et millésime bien en vue sur l’étiquette, sous un nom pompeux à la Château Clouseau. Aujourd’hui, on en a que pour les assemblages. Le mouvement foodie du 21e siècle a amené la tendance du branding au vin, rendant ce nectar des dieux plus accessible, avec moult assemblages pour ravir tous les palais et leurs voisins. Et ne tentez pas de savoir ce qui se cache derrière l’étiquette, car un Red Truck ne s’obtient pas en pressant de vieux camions de ferme.

Les assemblages ont aussi pris le contrôle du marché de l’automobile, seulement ici on les nomme « multisegments ». Les amateurs purs et durs, fins renifleurs de 10W30, adorent leurs voitures sport, berlines et camions, mais les transgenres que sont les multisegments ont conquis le marché, et peu importe l’étiquette qu’ils portent, difficile de dire ce qu’ils sont vraiment.

Dans leur rôle de critiques, les amateurs d’auto lèvent le nez sur les multisegments. Mais tout comme les assemblages vinicoles, ces derniers peuvent en faire voir de toutes les couleurs et s’adapter aux goûts individuels, peu importe ce que les critiques en pensent. Et le temps fait son œuvre, car certains d’entre eux développent un penchant pour ces assemblages. Plusieurs producteurs connaissent le succès avec eux, même des maisons aussi stoïques que Château Cadillac.

La Récolte

Pour rendre à César ce qui lui appartient, Cadillac a accueilli le vent nouveau avec enthousiasme lorsque les Allemands se sont mis à prendre le marché du véhicule de luxe au sérieux avec leur offre plus effervescente. La première CTS marquait l’arrivée de la philosophie « Arts et Science », reléguant aux oubliettes les toits landau capitonnés. Ferme comme un cabernet sauvignon, la base de la CTS servit à l’élaboration du premier multisegment chez Cadillac, le SRX. Ce sept passagers a bien plu aux critiques, a reçu les accolades de la presse spécialisée, mais n’a pas réussi à séduire le public. Trop aromatique et charnu, finalement. Pour sa seconde génération, le SRX se paie un virage très merlot, rond en bouche et bien doux, et largue son châssis sportif à propulsion pour une configuration traction avant et cinq places. Avec sa douceur et son minimum de paillettes, le SRX nouveau séduit le public et sème l’ennui chez la critique. Difficile de plaire à tout le monde!

Cadillac revoit donc son assemblage, avec l’intention de plaire à tous cette fois. Ainsi sort de ses caves le SRX nouveau à la mi-2016, frappé du millésime 2017 et élaboré sur la plate-forme C1XX partagée par les nouvelles générations du Terrain, Traverse et Enclave. Ces derniers ayant su assembler satisfaction de la clientèle et ravissement de la critique, tous les espoirs étaient permis. Soigneusement mitonnée pour le marché du haut de gamme où évolue l’XT5, la plate-forme fut raccourcie à l’arrière, n’ayant point besoin d’une troisième rangée de sièges, et son empattement fut allongé par rapport au SRX pour offrir un espace princier à la seconde rangée. Sous le capot s’est inséré le nouveau V6 3,6 litres de General Motors, une mécanique moderne à double arbre à cames en tête, dotée du calage variable des soupapes, de l’injection directe et de la désactivation de cylindres, le tout servi avec une boîte automatique conventionnelle à 8 rapports. La traction intégrale livrable met à profit trois embrayages contrôlés par microprocesseur, un système fourni par Haldex qui réparti le couple entre l’avant et l’arrière, puis de gauche à droite aux roues postérieures. Un assemblage fort ingénieux.

Malgré une empreinte quasi identique à celle du SRX, le XT5 tient la forme et accuse 130 kg de moins que son prédécesseur. Il reste qu’à près de deux tonnes impériales, il se marie très bien avec la remorque de 1580 kilos de votre choix. Cette perte de poids s’est obtenue par un assemblage choisi de quatre grades d’acier, soudés et collés les uns aux autres. Les sous-châssis sont isolés de la coque par du caoutchouc pour contrôler les vibrations, et les suspensions sont, évidemment, indépendantes aux quatre roues et accompagnées de barres antiroulis massives. Le XT5 offre une silhouette ravissante, avec une partie avant fraîche et élégante, digne du premier rang de votre étalage, avec des feux à DEL étroits et élancés qui encadrent une variante actualisée de la traditionnelle calandre. Le tout évite les excès de certains compétiteurs nippons.

Vue de profil, la ligne se relève graduellement vers l’arrière et se termine sur un hayon tronqué, flanqué de feux arrière affichant de délicates ailettes qui impressionnent moins de jour que de nuit. Les jantes de 20 po du modèle d’essai remplissent les logements de roues, avec un rehaussement perçu à l’arrière. En limitant les porte-à-faux et en repoussant les roues vers les coins, les stylistes ont su amincir le XT5 tout en lui donnant des proportions athlétiques. Avec sa robe Havre Bleu Métallisé, nouvelle pour 2018, agrémentée de juste ce qu’il faut de chromes, le XT5 ravit et démontre qu’il a bien sa place dans cette catégorie.

Notes et arômes

Ce XT5 particulier porte la finition Platinum, le summum de l’expression pour cet assemblage (pardon, multisegment). De la sorte, on y dénote des arômes de cuir pleine fleur, de suède et de bois. Toutes les saveurs perçues sont de sources naturelles : le bois est du bois, le cuir est partout, même sur le dessus de la planche de bord, et ce qui semble être du suède sur le pavillon et la face du tableau de bord en est vraiment; bref une atmosphère authentique. Cadillac semble honorer une tradition printanière bien canadienne en nommant la teinte intérieure « sucre d’érable », qui, quoique douceur pour les yeux, demande une mise en garde pour les amateurs de denims : avec seulement 8 000 km au compteur, le véhicule d’essai témoigne du transfert de teinture sur le siège du conducteur. Dommage.

Au premier abord, le nez dénote d’abord cet effluve de cuir fin, suivi de la révélation d’une position de conduite plus terre à terre que sur ses cousins des classes populaires, partageant la même plate-forme. Le XT5 livre toutefois cette élusive assise « neutre », qui ne témoigne d’aucune montée ou descente dans le véhicule. L’assemblage visuel de cuirs pâles, boiseries rousses et plastiques noirs plaît aux yeux, mais on réalise rapidement pourquoi la compétition place le noir sur la planche de bord plutôt que dessous : la vaste étendue de cuir érable provoque d’incessants reflets à l’intérieur du pare-brise, ce qui agace par moment, en particulier aux moments d’éblouissements, comme à la sortie d’un stationnement souterrain. Les baquets royaux à l’avant tout comme la colonne de direction inclinable et télescopique comportent moult réglages électriques dont trois combinaisons peuvent être mises en mémoire. Le volant gainé de cuir, élégant avec sa bande de bois et tombant bien en main avec son boudin de bon diamètre, vous réchauffe délicieusement les mains en ces matins de printemps frisquet – attention toutefois aux garnitures métalliques à 3h et 9h, frigides, qui vous enverront les mains plus haut ou plus bas sur le volant sans même y penser.

Le tristement célèbre système d’infodivertissement CUE de Cadillac (pour Cadillac User Experience) s’affiche à l’avant-scène; même si les menus de la version courante se sont beaucoup améliorés, il lui manque toujours le raffinement et le plaisir tactile des touches redondantes et du bouton de volume que l’on retrouve associés au système Buick Intellilink du cousin Enclave, une copie de CUE sous nouvelle étiquette. Les contrôles à effleurement du XT5 offrent quand à eux des réponses aléatoires et irrégulières, de par leur absence de rétrocession aux doigts qui glissent dans un véhicule en mouvement – vaut mieux employer les touches de son situées sur le volant. En explorant CUE depuis l’arrêt, on y retrouve des notes astucieuses, comme ce réglage automatique du volant et des sièges chauffants, qui s’accorde avec la température de l’habitacle, et qui s’est révélé fort habile. Toutefois, le chauffage maxi des sièges semble plus conçu pour les hivers des côtes du Rhône que pour les nôtres – aucun risque de surchauffe postérieure. Heureusement aussi que la climatisation automatique est efficace, car ses contrôles, qui semblent être à effleurement, mais sont en réalité des boutons cachés sous une surface de plastique flexible, font très…vin d’épicerie.

Dans le plus pur esprit Cadillac, les sièges arrière sont princiers. Assises 60/40 ajustables d’avant en arrière, dossiers inclinables 40/20/40, appui-bras central escamotable – vous direz qu’il n’y manque que le chauffage? Eh bien, il est là, aux deux places extérieures. Les passagers peuvent également ajuster leur propre flot d’air et température. Malgré une ceinture de caisse assez haute, le compartiment passager est bien aéré grâce au vaste toit panoramique. Libre de l’ombre d’une 3e rangée de sièges, le coffre est vaste et accueille sans peine un sac de golf (c’est un Caddie, après tout). Le plancher s’incruste de rails dans lesquels coulisse une petite barrière que l’on peut replier et loger sous le plancher lorsque ses services ne sont pas requis; elle est efficace, mais l’assemblage manque de rigidité. Sous le plancher se trouve une véritable cave, où vos précieux biens resteront à l’abri de la lumière et des effluves de caoutchouc, car un compresseur remplace la roue de secours. De simples manettes mécaniques libèrent les dossiers depuis l’arrière du véhicule, mais à ce prix on s’attendrait à des contrôles électriques, qui remonteraient les dossiers. Le hayon lui-même est électrifié, mais le système mains libres ne m’a pas admis dans son club.

La Dégustation

Le secret d’une bonne dégustation réside dans la neutralisation de son palais. Descendant littéralement d’un Escalade, peu d’effluves étaient communs, surtout celle éveillée par le bouton de démarrage du gros VUS, soit celle d’un monstre mécanique assourdi par l’insonorisation. Rien de tel dans le XT5. Malgré une fiche technique impressionnante, la sonorité du V6 de 3,6 litres au ralenti a ramené la mémoire de la Chevrolet Celebrity 3,1 litres de ma mère. Et cette mémoire est demeurée bien présente sur tous mes trajets, sauf à plein régime où le 3,6 litres s’affirme avec plus de musicalité. Le XT5 a gravement besoin qu’un acousticien se penche sur ses échappements, et qu’il isole le compartiment moteur au passage, que diantre! Les ingénieurs de chez Cadillac devraient, avec humilité, emprunter le cousin Buick Enclave Avenir pour expérimenter ce que l’acoustique d’un assemblage de 70 000 $ devrait être. Avec plate-forme et moteur partagés, on s’attendrait à rien de moins chez Cadillac, non? Pendant qu’ils y sont, ils devraient revoir la programmation de la boîte automatique qui passe parfois brusquement les rapports dans l’indécision quand le conducteur remet les gaz après un quasi-arrêt.

Oublions nos oreilles pour l’instant et passons aux papilles. La chaîne audio Bose à 14 haut-parleurs saura très bien placer la sonorité du moteur au rancard. Quand un assemblage prend du galon chez la clientèle, le vignoble se met à jouer de sa recette, altérant les proportions des cépages et en tirant des éditions spéciales plus raffinées, souvent pour plaire aux critiques. La finition Platinum évaluée ici semble destinée à ces derniers, amateurs de produits bien francs. Bien que toutes les variantes du XT5 partagent la même mécanique, avec le choix de la traction avant ou intégrale, le Platinum est livré avec des pneus de taille 235/50R20 montés sur des jantes polies comme de l’argenterie et dont les ébats sont régis par des amortisseurs à contrôle continu fournis par l’équipementier ZF Sachs. Il en résulte que, même sur le plus souple des trois réglages (Tour, AWD et Sport), le XT5 offre un roulement ferme qui secoue par moments. La direction plaît par sa fermeté et le XT5 attaque les courbes avec un aplomb étonnant pour un véhicule du genre. Il se situe beaucoup plus près de ses concurrents germaniques que des merlots bien souples que sont les Lexus RX par exemple. Dommage toutefois que la structure près du hayon craque comme une barrique de chêne sur les mauvaises surfaces – trop rigides, ces amortisseurs? En tirant le petit levier de vitesses électronique vers soi, à la position « M », on active les palonniers qui sont bien cachés derrière le volant, mais entre leur positionnement peu pratique et huit rapports parmi lesquels s’égarer, aussi bien laisser le XT5 faire son travail en « D ». Pour relever l’expérience, et ajouter de la personnalité, ce critique s’est dit que le 2 litres turbo de Cadillac pourrait être inséré sous le capot. En fait, Cadillac offre déjà cette combinaison, mais pour le marché chinois seulement.

Les acheteurs souhaitant un mélange plus doux feraient mieux de lorgner du côté des éléments plus populaires de la gamme, chaussés de jantes de 18 pouces avec pneus à flancs plus souples, et dotés d’amortisseurs conventionnels. Leurs prix permettent également de consacrer plus de budget à votre cellier. Comme toujours, les cuvées spéciales font grimper le prix au niveau on l’on est en droit de se demander, « Devrais-je, vraiment? ». Bien qu’il s’agisse de pure spéculation de ma part, n’ayant point goûté aux livrées de base, on est en droit de s’attendre à ce qu’elles offrent des tannins plus balancés, au plus grand plaisir du public comme de la critique. D’ailleurs, les ventes de Cadillac grimpent en ce moment, ce qui semble supporter cette théorie. Le XT5 offre d’autres attributs qui le rendent agréable au quotidien, comme une excellente visibilité malgré la haute ceinture de caisse (vous allez la ressentir celle-là aux bornes de stationnement). Cette innovante caméra qui fait office de rétroviseur central mérite également quelques lauriers; une fois vos yeux habitués à regarder directement derrière le véhicule, sans avoir à franchir l’habitacle du regard, vous apprécierez le grand angle de visée qui couvre largement les angles morts. Divin! Vous ne vous y faites pas? Alors d’un simple mouvement cette petite merveille redevient un bon vieux rétroviseur.

Et si j’ai exprimé des doutes sur la valeur ajoutée de la livrée Platinum, rien de tel quand au groupe optionnel d’aides à la conduite. Le régulateur de vitesse adaptatif fonctionne sur toutes les plages de vitesse et s’avère souple et efficace, bien loin de l’expérience vécue dans un Acura MDX qui m’a rappelé une balade en dromadaire. Le freinage automatisé s’avère aussi prompt à réagir, une fonction brillamment démontrée par un camionneur visiblement dépourvu de caméras d’angles morts. Un bémol pour les ceintures autoserrantes qui se prennent pour une certaine Plymouth Fury 1958 à chaque départ. Enfin, tout comme moi, vous vous amuserez comme un gamin à laisser le XT5 vous démontrer son expertise en stationnement parallèle automatisé à la moindre occasion. Un plaisir!

La Finale

Alors que nous prenons des notes, apprécions le fait que le XT5 s’abreuve de carburant régulier, une rareté dans le monde du produit de luxe. Toutefois, sous mon aile, l’ordinateur de bord témoigne d’une soif certaine par les 12,9 l/100km obtenus en conduite urbaine mixte, et ce malgré le système arrêt/départ, la boîte à huit rapports et la cylindrée variable. C’est à peine 3 litres de moins que ce grand cru d’Escalade, mais qui lui, carbure au super. La calculette envoie ma note dans les quinze, mais je me doute que le sommelier précédent n’a pas rempli le réservoir au bouchon – je déteste les bouteilles entamées. Avec sa figure fraîche et nette, son intérieur aromatique, un châssis vivifiant et ce soupçon de technologie, le XT5 est une offre vibrante parmi la gamme des assemblages, pardon, multisegments intermédiaires de luxe, mais l’expérience pourrait être relevée en accompagnant ce vif mélange du 2 litres turbo dont bénéficient les Chinois. Avec un tel mariage, il gagnerait en finesse ce qu’il perdrait en soif.

Les concurrents
Caractéristiques
Cylindrée 3,6L
Nb. de cylindres V6
Puissance 310 ch @ 6 600 tr/min
Couple 271 lb-ft @ 5 000 tr/min
Consommation de carburant 12,8/9,3/11,2 L/100 km ville/route/comb
Volume de chargement 849 / 1 784 L
Modèle à l'essai Cadillac XT5 AWD Platinum 2018
Prix de base 69 110 $
Taxe climatiseur 100 $
Frais transport et préparation 2 000 $
Prix tel qu’essayé 73 805 $
Équipement en option
2 595 $ – Groupe d’aide à la conduite (régulateur de vitesse adaptatif à toutes les vitesses, tension automatique des ceintures de sécurité, aide au stationnement automatique, freinage automatique anticollision, freinage automatique en marche avant et arrière) 2 595 $