Avis d'expert

Ford Mustang GT Premium 2019 : essai routier

7,1
10
SCORE AutoHebdo
Ce score est attribué par notre équipe d’experts après des tests approfondis de la voiture
  • DESIGN
    9/10
  • Sécurité
    7/10
  • HABITABILITÉ
    6/10
  • CONVIVIALITÉ
    6/10
  • CARACTÉRISTIQUES
    7/10
  • PUISSANCE
    9/10
  • CONFORT
    5/10
  • AGRÉMENT DE CONDUITE
    8/10
  • CONSOMMATION DE CARBURANT
    6/10
  • VALEUR
    8/10

La vie d’un chroniqueur automobile est parfois parsemée d’imprévus. Depuis plusieurs semaines, j’anticipais l’essai d’une sobre et jolie Mustang cabriolet à quatre cylindres. Qui plus est, Dame Nature nous offre enfin une semaine digne du « Vous êtes ici » du calendrier, avec soleil et chaleur. Beau temps et décapotable – le bonheur! Mais voilà que ma belle bleue est partie avec un autre. 310 équidés de perdus, 460 de retrouvés, me dira-t-on, car Ford m’a offert en substitut un Coupé GT à huit cylindres et trois pédales toutes neuves, et portant la robe provocatrice d’un autobus scolaire en cette dernière semaine de classes pour nos enfants. On balance les cartables au recyclage et on fait rugir de joie cette belle bête!

Même le Pape deviendrait un hooligan au volant d’une Mustang GT.

Éducation internationale

Comme nos ados qui grandissent, la Mustang est passée par plusieurs phases depuis ses débuts en 1964. Si l’élégante et svelte première génération avait été adoptée par une « Bond Girl », le coupé a gagné graduellement en machisme jusqu’à l’arrivée de la première crise du pétrole, qui a vu le lancement de la Mustang II aux gênants châssis et moteur de Pinto.

La génération actuelle, parue en 2015, est véritablement la première à avoir été conçue pour affronter le marché européen. De là sont nées les prémisses incontournables du carnet de commandes : une suspension arrière enfin indépendante, un moteur compact et moderne, soit le 4 cylindres EcoBoost de 310 chevaux, et une ligne à faire pâmer un italien, à la fois moderne et rétro. Succès immédiat dès le lancement sur le Vieux Continent, mais surprise, le marché – l’Allemagne en particulier – préfère de loin le traditionnel V8…

Cette ligne, il faut prendre le temps de la caresser du regard pour bien apprécier l’élégance agressive qui s’en dégage, avec moult détails, tel cet incisif becquet avant et le galbe généreux de ses ailes. C’est en la déshabillant des bandes, aileron arrière et peinture voyante qu’on en révèle la beauté, étonnante pour une voiture qui démarre sous la barre des 30 000 $. À l’intérieur, on déniche bien quelques plastiques durs çà et là, mais on est à des lieues des prairies pétroligènes des Challenger. La nacelle d’instruments électroniques offre un large compte-tours et un pratique indicateur de rapport pour la boîte manuelle. Les enveloppants sièges Recaro offrent un confort suprême, pour autant que notre anatomie soit compatible et qu’on ne porte pas de vêtements d’hiver. La climatisation est efficace, heureusement car la vaste lunette arrière absorbe le soleil à grand goulot. Les places galbées arrière sont étonnamment confortables, et le coffre bien fini est plus pratique qu’anticipé.

Un cheval, des chevaux

Le V8 « Coyote » de Ford a fait ses débuts en 2011 sous le capot de la génération précédente de la Mustang. Très loin de l’ancien « 5.0 » des Mustang à plate-forme Fox (dont il ne partage que le surnom), ce huit cylindres à injection directe avec bloc en alliage léger a peu à envier aux tonitruants V8 allemands, avec ses deux arbres à cames en tête qui actionnent quatre soupapes par cylindre. Suite à la refonte de 2018, ses manchons d’acier pour les cylindres ont été remplacés par une mince pellicule chimique, faisant passer la cylindrée de 4 951 cc à 5 038 cc, et le taux de compression fut révisé à 12,0 : 1. Le résultat : des gains de 25 ch et 20 lb-pi de couple, et une ligne rouge rehaussée de 400 tours pour le plaisir des oreilles.

Ce V8 apprécie d’ailleurs les montées en régime, cette ligne étant fixée à 7 400 tours/min. La puissance maximale de 460 chevaux est toutefois atteinte dès les 7 000 tours. Notez que l’édition limitée Bullitt, inspirée du classique film de Steve McQueen, tire 480 équidés du même moteur, et que ces scores sont obtenus avec du carburant à indice d’octane de 93. Le moteur accepte le carburant régulier (87 d’octane), mais sa puissance sera un tantinet en retrait.

Pour meurtrir les pneus arrière, le V8 fait appel de série à une boîte manuelle à six rapports ou, en option, à une nouvelle boîte automatique à dix rapports, aussi apparue en 2018. C’est avec cette dernière que la Mustang abat le 0–100 km/h en moins de 4 s selon Ford. Des choix de rapport de pont arrière sont offerts et avec une propulsion dotée d’une telle cavalerie, on vous recommande fortement l’option du pont à glissement limité dont dispose notre furie orange. La voiture d’essai dispose également de trois pédales, accompagnées de série d’un mode de mariage automatisé des régimes au rétrogradage automatique.

Ma petite pouliche

Le dessin animé « Ma petite pouliche » se nomme My Little Pony en anglais, source d’inspiration possible du bouton orné d’un cheval que Ford baptise « My Pony ». Pas de Little ici, avec ce V8 rugit comme un cheval carnivore sorti des enfers. Cette touche fait apparaître un menu de personnalisation au centre de la nacelle virtuelle d’instruments. C’est là qu’on retrouve entre autres les contrôles du système d’échappement actif optionnel, allant de l’optimiste « Silencieux » à l’infernale « Piste » (pour conduite sur circuit seulement nous avertit Ford à l’écran).

Cette option à 1 000 $ ajoute un système de valves papillon à commande électrique dans le système d’échappement; en mode « Silencieux », elles sont fermées, et en mode « Piste », elles sont complètement ouvertes. Entre ces deux extrêmes, on retrouve les modes « Normal » et « Sport ». Il est possible de programmer une plage horaire qui impose le mode « Silencieux » au démarrage, abaissant le volume de près de 10 décibels versus le « Normal » – une option que les voisins apprécient quand on quitte pour le boulot aux petites heures du matin! Même en mode « Normal », quand on croise de jeunes mamans avec poussettes et bébés endormis, le niveau sonore et les pétarades du Coyote vous valent des regards à vous glacer le sang…

Reste que le gamin de 11 ans qui sommeille en moi passe au mode « Piste » avec régimes assistés dès que la route se libère. La sonorité du V8 passe du rock au speedmetal et le moulin pousse des notes aussi fortes que sublimes dans une symphonie mécanique débridée digne d’un bolide de course. Son baryton est viril, non sans rappeler celui qu’on entend sur les circuits Nascar. On n’achète pas une Mustang GT pour son côté introverti. Considérez l’échappement actif comme une option obligatoire, tant pour votre plaisir que vos bonnes relations avec le voisinage.

Éducation physique

La Mustang GT est un peu comme le matamore qui fait sa loi dans la cour d’école. Elle aime exhiber ses muscles et la subtilité n’est pas son fort. On doit donc l’approcher avec soin, comme je l’ai appris lors de la prise en main. Les ressorts semblent fabriqués de ces blocs de ciment avec lesquels on monte les murs de gymnase. Quant aux amortisseurs, ils préfèrent vous tabasser sans raison. La suspension de série de la Mustang GT est en déni total du monde réel dans lequel la voiture évolue. Ça brasse, ça secoue alors que la voiture danse sur le pavage rapiécé de la métropole comme un baigneur sur du sable trop chaud. Les trop petits rétroviseurs deviennent flous, et on a plus l’impression de s’accrocher au volant comme à la crinière d’un cheval emballé. Vous aurez compris que les amortisseurs adaptatifs optionnels « MagneRide » sont chaudement recommandés, comme nous le confirme un lecteur, heureux propriétaire d’une Bullitt 2019.

Pour mater la bête, on s’inspire du Nascar. On place le dossier du siège Recaro à réglages manuels bien droit, et on approche le volant télescopique de notre torse. Les coudes bien pliés, comme un pilote, on garde la bête sous notre poigne et on reprend le contrôle. Et on quitte le bitume ravagé de la ville pour les grands espaces des couronnes. On y oublie rapidement la chaîne audio B&O optionnelle de la voiture d’essai, malgré ses basses puissantes, car on préfère de loin la bande audio de la mécanique. Visiblement, la Mustang GT est bridée par les voies publiques et on y ressent un potentiel qui ne demande qu’à être libéré sur un circuit. À vitesse de croisière, la direction s’affûte et se révèle précise, ni trop légère, ni trop lourde. Les freins à étriers Brembo effacent les km/h en trop aux approches des rampes de sortie avec une autorité rassurante. Et des km/h de trop, croyez-moi, vous en aurez. À 100 km/h en 6e, le V8 ronfle doucement à 1 750 tours/min; à 2 100 tours, à la vitesse tolérée de 119 km/h, le Coyote ponctue son impatience de Blap-blap-blaps bien audibles. La musique des échappements vous incite à en rajouter. Jamais plus vous ne maugréez les voitures beiges qui pataugent à 60 km/h dans la voie de gauche, car sitôt intimidées par la grille noire de la Mustang, elles vous libèrent la voie et vous offrent la chance d’un double rétrogradage suivi de quelques secondes d’un jouissif rugissement pouvant atteindre les 115 décibels. Même le Pape deviendrait un hooligan au volant d’une Mustang GT. Dans la circulation dense, l’embrayage costaud devient lassant, mais le couple généreux autorise les démarrages en 2e sans problème. Le lien mécanique très direct entre le court levier de vitesses et la boîte est évident, vibrations à l’appui, et son maniement est précis, mais viril.

Généreusement chaussée de pneus d’été tendres, plus larges à l’arrière qu’à l’avant, jamais la Mustang n’a osé briser son lien avec le bitume sous notre gouverne. Les équidés sont là pour le faire, mais comme on le disait, les limites de cette voiture sont trop hautes pour déconner de la sorte sur la voie publique. Même par une journée de pluie sur le bitume graisseux de la ville, la Mustang GT reste scotchée à la chaussée là où ma belle Allemande à traction avant glisse sur des bananes – chapeau aux gommes Michelin. Outre les modes « Normal », « Sport », « Piste » et « ¼ de mille », la GT offre un mode « Neige et pluie » par lequel vous pourrez découvrir l’équilibre de la voiture sur la neige, question de le faire à des vélocités raisonnables. Sur le sec, prévoyez les explorer sur un circuit fermé, dépourvu de préférence de glissières de béton…

La Belle et la Bête

C’est après quelques jours de conduite qu’on s’adapte à celle que j’ai affectueusement surnommée « La Bête ». Les bosses et fissures ne surprennent plus et deviennent les vibreurs de nos trajets quotidiens. On se glisse naturellement dans les Recaro en repliant les bras, comme pour entrer dans une voiture de course, et on esquisse un petit sourire en coin à chaque pression du bouton de démarrage. On apprivoise notre monture et on réalise avec le temps que la brute à gros biceps dispose des atouts pour faire rougir une Européenne à la facture passablement plus salée si elle l’affrontait sur un circuit. Qui plus est, la Bête affichait 14,0 l/100 km au terme de l’essai, dans la moyenne d’un bien terne VUS à trois rangées de sièges, et on l’a descendue dans les 10 sur autoroute. Une brute qui aime les maths, qui l’eut crû?

La Mustang a fait ses classes, et elle évolue dans les ligues majeures, tout comme ma belle Jasmine, qui termine avec brio son secondaire. Pour une fille pas comme les autres, quoi de mieux qu’une limousine de bal aux couleurs d’un autobus scolaire et au son d’enfer pour se distinguer d’une procession de belles Allemandes au tapis rouge? La Mustang GT est une extrovertie qui exploite sa légende, certes, mais qui démontre haut et fort que sa réputation de « tueuse de géants » est bien méritée. Comme pour ma fille, elle affiche aujourd’hui des acquis qui lui permettent sans gêne d’affronter le monde.

Les concurrents
Caractéristiques
Cylindrée 5,0L
Nb. de cylindres V8
Puissance 460 ch @ 7 000 tr/min
Couple 420 lb-pi @ 4 600 tr/min
Consommation de carburant 16,1 / 9,9 / 13,3 L/100 km ville/route/comb
Volume de chargement 383,1 L
Modèle à l'essai Ford Mustang GT Coupé Premium 2019
Prix de base 47 725 $
Taxe climatiseur 100 $
Frais transport et préparation 1 750 $
Prix tel qu’essayé 63 275 $
Équipement en option
13 700 $ – Peinture Orange Furie trois couches, 550 $; Ensemble 401A (navigation, borne WiFi, alerte circulation latérale, garnitures relevées), 2 350 $; Ensemble Haute Performance GT (jantes aluminium noir 19 po, pneus d’été performance 255/40R19 avant, 275/40R19 arrière, pont arrière à glissement limité et rapport de 3,73, aileron arrière sport), 4 200 $; Ensemble Sécurité intelligente (régulateur de vitesse adaptatif), 1 500 $; Bande de course noire, 600 $; Ensemble Sécurité améliorée (antivols de jantes, système antivol actif), 700 $; Chaîne audio B&O à 12 haut-parleurs, 1 000 $; Soupapes d’échappement actives, 1 000 $; Sièges en cuir régulier Recaro, 1 800 $