L’assurance automobile est un domaine où les primes sont aussi imprévisibles que les gazouillis d’un certain président. On y remarque bien certaines tendances qui vont dans le sens de l’évidence : plus on réclame, et plus notre dossier s’entache de points d’inaptitude, plus on devient un client dit « à risque » pour les assureurs, d’où une hausse de primes. Le choix de monture, l’âge du conducteur et sa situation personnelle sont tous d’excellents indicateurs du niveau de prime. Pas besoin d’une maîtrise en statistiques pour savoir que la prime d’un jeune cascadeur urbain qui utilise sa voiture sport pour le boulot sera plus salée que celle d’un papa comptable de banlieue qui laisse sa minifourgonnette au garage pour aller travailler en bus.
Des primes à géographie variable
Les régimes en vigueur dans notre province de résidence comptent pour beaucoup dans l’établissement d’une prime. La version québécoise de l’assurance « sans faute » vient interdire les poursuites entre assurés, réduisant dans l’ensemble le coût des primes d’assurances automobile privées dans La Belle Province, de loin les moins chères au pays selon les courtiers en assurance ARC. Pour le consommateur ontarien, dont les primes sont les plus chères au pays (le double du Québec!), tout rabais d’assurance qui n’implique pas de déménager à l’Est de la rivière des Outaouais sera fort attrayant.
Et c’est ici qu’une fois de plus, le choix d’un véhicule électrifié promet un effet bénéfique sur les coûts récurrents du budget de la maisonnée. En plus des incitatifs à l’achat offerts par certaines provinces et municipalités, du passage gratuit sur des routes tarifées, des places de stationnement privilégiées, des opportunités de recharge publique et de la diminution de la part du budget consacrée au carburant et à l’entretien, voilà que l’industrie privée de l’assurance introduit des rabais sur ses primes pour les véhicules hybrides (HYB), hybrides rechargeables (PHEV) et électriques (VÉ). TD Assurances promet par exemple 5 % de rabais sur votre prime si vous conduisez un véhicule électrifié. Chez Desjardins, on publie une liste de véhicules éligibles à un rabais « vert ». On retrouve ainsi une forme de rabais ou une autre chez la plupart des grands assureurs présents sur le marché canadien.
Révélations électrisantes?
Nos collègues d’AutoTrader.ca se sont penchés sur l’approche de l’industrie de l’assurance canadienne face aux véhicules électrifiés. C’est ainsi qu’ils ont découvert que tous les assureurs se basent sur des indices compilés par le BAC, le Bureau d’Assurance du Canada, pour établir les « coûts » de chaque modèle d’automobile en matière de réclamations. À la base, les véhicules électrifiés coûtent davantage à réparer, mais la très faible proportion qu’ils représentent dans le parc automobile canadien fait en sorte qu’ils sont somme toute peu représentés dans les accidents. C’est ce qui permet aux assureurs d’offrir des primes réduites pour ces véhicules, le peu de réclamations venant compenser les coûts unitaires plus élevés. Le milieu donne donc une chance au coureur, le temps de bâtir plus de statistiques. Selon cette logique, plus un véhicule électrifié est populaire, plus il sera susceptible d’être présent dans des accidents et donc voir sa prime se normaliser face à des véhicules à essence de même valeur.
Poussons donc cette réflexion un peu plus loin avec quelques études de cas bien concrètes. Nous avons comparé pour vous les primes de véhicules qui sont susceptibles d’être comparés l’un à l’autre en fonction de certains profils de consommateurs.
Vous aurez compris qu’une prime auto est aussi volatile que le prix de l’essence à la pompe, donc que le coût absolu d’une prime n’est aucunement représentatif d’un conducteur à l’autre; nous incluons néanmoins ces primes à titre indicatif. Elles sont basées sur le dossier d’un sage conducteur québécois de banlieue, dans la quarantaine, marié, au dossier parfait et qui utilise son auto pour aller au boulot, afin d’établir les variations de prime sur l’outil de magasinage en ligne d’un grand assureur canadien. Cet assuré fait moins de 15 000 km par an, partage son véhicule avec conjoint et deux adolescents, demande une valeur à neuf de 5 ans sur son nouvel achat et des franchises minimales de 250 $ pour collisions et 50 $ pour autres réclamations.
Le frugal
Voici un consommateur qui surveille de près son budget mensuel. La Hyundai Elantra GT à hayon semble tout indiquée pour lui, et elle partage la salle de montre avec l’Ioniq, aussi une cinq portes, livrable en versions hybride, PHEV et complètement électrique. Beaucoup de choix sous un même toit, mais … la facture?
Modèle | Propulsion | PDSF | Prime | Variation |
---|---|---|---|---|
Elantra GT automatique |
essence |
21 699 $ |
452 $ |
référence |
Ioniq hybride |
HYB |
24 300 $ |
431 $ |
-5 % |
Ioniq électrique Plus |
PHEV |
31 999 $ |
448 $ |
-1 % |
Ioniq électrique |
VÉ |
35 649 $ |
457 $ |
+1 % |
La prime d’assurance est très similaire au final pour ces quatre « hatchbacks » cinq portes, le rabais de l’assureur venant ici compenser pour la valeur supérieure des modèles rechargeables. Match nul.
Le volontairement simple
Quatre roues, un volant, rien de plus simple. Notre consommateur entre chez Nissan et compare une Leaf de base avec une Versa Note SV à boîte CVT. Pas plus de luxe ou d’espace dans une Leaf, mais elle se vend quand même au prix de deux Versa…
Modèle | Propulsion | PDSF | Prime | Variation |
---|---|---|---|---|
Versa Note SV (CVT) |
essence |
18 298 $ |
426 $ |
référence |
Leaf S |
VÉ |
35 998 $ |
469 $ |
+10 % |
Quand on compare une pomme avec une pomme électrifiée, il est difficile de justifier cette dernière sur la base implacable du budget. La Leaf, bien connue des assureurs, car sur le marché depuis longtemps, est significativement plus chère à assurer qu’une modeste sous-compacte. En termes absolus, sa prime est même un tantinet supérieure à celle de la Hyundai Ioniq, pourtant offerte à un prix similaire.
Le voyageur de commerce
En voici un qui passe ses journées sur la route et qui de par ce fait doit payer de fort jolies primes. La Ford Fusion SE est tout indiquée pour avaler des dizaines de milliers de kilomètres par année, et elle est livrable en modèle essence, hybride et PHEV. En plus de l’essence, notre grand voyageur va-t-il économiser sur ses primes avec les Fusion « vertes » ?
Modèle | Propulsion | PDSF | Prime | Variation |
---|---|---|---|---|
Fusion SE 2,5 litres |
essence |
25 998 $ |
505 $ |
référence |
Fusion SE Hybrid |
HYB |
29 588 $ |
484 $ |
-4 % |
Fusion SE Energi |
PHEV |
33 938 $ |
500 $ |
-1 % |
Les Fusion de tous modes sont bien répandues dans les parcs de véhicules des grandes entreprises et des locateurs. Elles sont donc bien documentées dans les statistiques des assureurs, ce qui tend à normaliser les primes entre les trois modèles. Bref, c’est à la pompe seulement que notre grand voyageur verra une économie.
La belle allemande
Chic! Une promotion! On se paie une belle allemande, mais sans liquider nos économies. La VW Golf offre ce je-ne-sais quoi de plus que ses rivales asiatiques, et se décline de plus en version complètement électrique. Sa proche cousine, la Audi A3 e-tron, offre une mécanique PHEV qui fait le pont entre les deux. Qui plus est, le prix de détail de ces jolies triplettes est assez similaire. La prime, svp.
Modèle | Propulsion | PDSF | Prime | Variation |
---|---|---|---|---|
Volkswagen Golf Highline (auto) |
essence |
33 040 $ |
507 $ |
référence |
Volkswagen e-Golf |
VÉ |
36 355 $ |
462 $ |
-9 % |
Audi A3 e-tron |
PHEV |
40 900 $ |
517 $ |
+2 % |
En partageant plate-forme et prix de détail, ces trois allemandes réduisent les variables et font ressortir la prime verte de l’assureur : la e-Golf électrique s’avère nettement moins chère à assurer que la Golf à essence. Quand à la e-tron, son électrification partielle vient effacer son PDSF supérieur aux yeux de l’assureur. À noter que ces deux modèles électrifiés sont assez rares sur nos routes.
L’amateur de vedettes
Si c’est populaire, ça doit être bon! La Honda Civic est la berline la plus vendue au pays. On la compare avec la Prius, emblème du monde des hybrides, et les très populaires Chevrolet Bolt et Volt.
Modèle | Propulsion | PDSF | Prime | Variation |
---|---|---|---|---|
Honda Civic LX CVT |
essence |
20 990 $ |
466 $ |
référence |
Toyota Prius |
HYB |
27 650 $ |
509 $ |
+9 % |
Chevrolet Bolt |
VÉ |
46 445 $ |
458 $ |
-2 % |
Chevrolet Volt |
PHEV |
41 045 $ |
434 $ |
-7 % |
Surprise : la Prius est beaucoup plus chère à assurer qu’une Civic, rançon de la gloire, ou la difficulté de réparer ses tôles tarabiscotées pour l’assureur? La Volt, au contraire, présente de sérieuses économies malgré son prix élevé. La Bolt coûte autant que deux Civic, mais s’assure au prix d’une seule. Comme quoi les palmarès ne sont pas toujours simples à lire…
La « soccer mom »
On connaît tous une super maman qui jongle carrière et engagements sportifs de sa marmaille tout en restant connectée aux réseaux sociaux. Elle roule évidemment en VUS, car elle n’a pas le temps de se soucier de la neige et de l’état de la chaussée. C’est à cause d’elle et de ses consœurs que l’Outlander PHEV a battu le record de ventes mensuelles au Canada pour un véhicule électrifié. Feront-elles des économies avec l’assurance?
Modèle | Propulsion | PDSF | Prime | Variation |
---|---|---|---|---|
Mitsubishi Outlander GT S-AWC |
essence |
37 998 $ |
565 $ |
référence |
Mitsubishi Outlander PHEV GT S-AWC |
PHEV |
49 998 $ |
520 $ |
-8 % |
Eh bien oui, et de façon significative! Ça libère du budget pour de nouveaux souliers de course…
À prix égal, on hésite…
Jusqu’à récemment, la Lincoln MKZ essence ou hybride s’offrait à prix égal. Cette année, il faut allonger 350 $ de plus pour la version écolo de cette élégante américaine de luxe. On les récupère en assurance, ces dollars?
Modèle | Propulsion | PDSF | Prime | Variation |
---|---|---|---|---|
Lincoln MKZ Select |
essence |
43 050 $ |
629 $ |
référence |
Lincoln MKZ Hybrid Select |
HYB |
43 400 $ |
554 $ |
-12 % |
Et la réponse est oui! Les berlines de luxe sont généralement des modèles performants. Il faut croire que les versions hybrides sont conduites plus doucement et présentent de meilleurs historiques de réclamation.
Le m’as-tu-vu
La berline de luxe, c’est tellement siècle passé. Pour être vu et bien vu, ça prend un VUS de nos jours, et un cher en plus. Comparons les montures de deux de mes voisins.
Modèle | Propulsion | PDSF | Prime | Variation |
---|---|---|---|---|
Porsche Cayenne S |
essence |
92 600 $ |
811 $ |
référence |
Tesla Model X 75d |
VÉ |
102 300 $ |
622 $ |
-23 % |
On aurait pu s’attendre à une facture supérieure pour le Tesla, avec sa coque en aluminium, son pare-brise gigantesque et ses portes arrière farfelues… Mais non! Économie considérable ici de près du quart de la prime !
On passe à la caisse
De ces tableaux, on dénote une tendance au lissage des primes quand un véhicule électrifié devient plus commun sur nos routes. Plus il fait partie du paysage, plus il fera partie des statistiques et plus sa prime sera basée sur son coût de remplacement, comme pour toute voiture, sans égard à sa touche écolo. Exception notable : la Volt, dont la prime annuelle ne dépasse celle de la Versa Note que de huit maigres dollars dans nos simulations. Autrement, le consommateur dont le profil fait hausser ses primes aurait tout avantage à considérer une « bibitte verte » rare comme la e-Golf pour diminuer ses dépenses de transport. En l’absence de données précises, les assureurs donnent effectivement le bénéfice du doute aux nouveaux véhicules électrifiés. Au rythme rapide de ses ventes, parions que la prime du Outlander PHEV va se rapprocher de celle du modèle à essence dans quelques années.
Ironiquement, l’autre tendance est que l’économie en primes d’assurance issue de l’électrification ressort surtout chez les véhicules de luxe, ceux-là mêmes, dont les heureux propriétaires seront moins influencés par une variation de facture. Bonne route et … soyez prudents!